samedi 14 mars 2015

Corps

écrit et mis en scène

par Adel Hakim


Théâtre des Quartiers d'Ivry, 1995

avec Charlie Nelson, Jany Gastaldi, Frédéric Leidgens, François RAffenaud, Sumako Koseki, Yuki Unemoto, Naomi Moto


De temps à autre, il est bon de plonger dans la mémoire pour en remonter des trésors enfouis. On ne fait pas mouche à chaque fois. Mais l'exercice, constructif, permet de mieux se situer dans l'implacable déroulement du temps.

C'était il y a vingt ans. Depuis, Adel Hakim a parcouru un immense chemin, du Liban au Chili, d'une forme à l'autre. Charlie Nelson et tous ceux et celles qui donnèrent le meilleur d'eux-mêmes ce soir-là, sur la scène d'Ivry, ont grandi dans toutes les directions.

Si longtemps après, le souvenir d'un moment de théâtre reste intact.


" Sumako Koseki a eu l'idée de relire Macbeth à la lumière de la pensée orientale, pour laquelle les rapports entre les hommes et le monde procèdent non pas des passions, mais d'un équilibre cosmique. Combien grotesque nous apparaît alors le déchaînement tribal de Macbeth, qui bâtit sa solitude sur les charniers nés de son orgueil ! Adel Hakim voit dans l'oeuvre la représentation ultime du corps torturé sous tous les registres : onirique ou réaliste, menaçant ou irréversible.

Et c'est un tout autre Macbeth qu'il nous est donné de lire : un drame dont le choeur est joué par trois danseuses de Butô grimaçantes, et récité par un mage en lisière de la scène : la Forêt, confuse et indivise, qui tente d'apporter un peu de sagesse à la folie des hommes, mais s'abandonne elle-même aux plus grimaçants sarcasmes en constatant la vanité de son espoir.

Avec un tel projet, comment ne pas révolutionner notre vision de l'oeuvre ? La réponse est simple : par un décor froid et sans envergure, par un jeu souvent banal et une gestuelle outrée, par des longueurs qui dilatent péniblement l'unité de temps durant deux heures sans entracte.

Charlie Nelson est un Macbeth crédible, et Frédéric Leidgens donne à la forêt son regard étrange. Le Butô est admirablement servi par Sumako Koseki et sa petite troupe. Mais Jany Gastaldi force les traits de Lady Macbeth. Les monologues alternent dans la monotonie, une impression de déjà vu s'installe à chaque nouvelle apparition. Un tempo plus concis aurait sans doute sauvé une partie du spectacle. Mais le crime de Macbeth n'est-il pas de perdre le respect du temps qui fuit ? " (Pierre Canisius, 23 janvier 1995)


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